Le Maquis de la Croix du Ban

Le Maquis de la Croix du Ban (Gabriel Péri)

1 – Les FTP-MOI : Francs Tireurs et Partisans – Main d’Oeuvre Immigrée

Dates importantes pour la résistance et les FTP :

  • – Ouverture du front de l’est avec l’URSS en juin 1941. Structuration de la résistance
  • – La Wehrmacht envahie la zone sud le 11 novembre 1942. Lyon de nouveau occupé
  • – Instauration du STO (Service du travail obligatoire) en février 1943. Cette fois, les travailleurs désignés étaient obligatoirement embrigadés au travail en Allemagne. Beaucoup le refusèrent et entrèrent dans la clandestinité.
  • – L’année 1943 vit l’arrivée à Lyon de Klaus Barbie et Paul Touvier

 Les FTP unifient au début de 1942, sous la direction de Charles Tillon, les différents groupes d’action initiés par le PCF (Parti Communiste Français)
 En région parisienne, en 1942, sont créées au sein des FTP des groupes FTP-MOI qui forment quatre détachements (roumain; juif; italien;  » dérailleurs « ), deux équipes bulgare et espagnole, un service médical, un service de renseignement et, en 1943, une équipe spéciale. Leur direction militaire est assurée à l’été 1943 par Missak Manouchian succédant à Boris Holban en liaison avec Joseph Epstein (FTP). 
Il faut attendre mars 1942 pour qu’apparaisse le premier embryon de ce qui sera le détachement Carmagnole à Lyon (Lyon est en zone dite libre, et n’est donc pas, jusqu’au 11 novembre 1942 – date de l’entrée allemande en zone Sud – un véritable terrain de lutte militaire).

Cette organisation, comme celle des FTP français est structurée géographiquement en « secteurs », « régions » (une région correspond en général à un département), « interrégions » (regroupement de plusieurs départements) et « zones » (nord et sud).

La F.T.P. compte 45 000 membres fin 1943, 130 000 en juillet 1944 et 230 000 à la libération. 

2 – FTP-MOI Carmagnole :

Un ancien officier des Brigades internationales, Joseph Kutin, est chargé par la direction de la M.O.I. de créer une unité de F.T.P.-M.O.I. pour opérer dans la région lyonnaise : « Carmagnole ». Après les rafles de l’été 1942 la plupart des jeunes de l’U.J.J. (Union des jeunes Juifs) rejoignirent, en région lyonnaise, le groupe F.T.P. « Carmagnole » formé ainsi et dirigé conjointement par d’anciens des Brigades internationales Roman Krakus et Isi Tcharnecki et de jeunes dirigeants de l’U.J.J. : Fred, Simon Fried et Francis Chapochnik. La période des attentats dans Lyon commença.De nombreux responsables se sont succédés (morts ou emprisonnés, changement d’organisation, …) dont un Roumain de 24 ans, George Filip ( Lefort) qui intervint lors de la libération de Villeurbanne.
Plus tard, la « Carmagnole » de Lyon forma les maquis de Saint-Pierre-la-Palud, d’Useran, de Sainte-Catherine et du Col-de-Brosse, à quinze ou vingt kilomètres de Lyon.

3 – Création du maquis dit  » maquis de la Croix du Ban « 

Le maquis Gabriel Péri dit maquis de la Croix du Ban a eu une existence éphémère : il a été installé officiellement le 6 juin 1944.
Les résistants FTP MOI Carmagnole Liberté composés d’une quarantaine de combattants pratiquaient à Lyon et dans le département du Rhône la guérilla urbaine, sabotage des usines travaillant pour l’occupant, des transports, déraillements, exécution de traîtres, attentats contre les détachements et casernement des troupes allemandes.

Extrait de « Carmagnole Liberté » : A la date du débarquement, les combattants des détachements  » Carmagnole » et  » Simon Fryd  » devaient quitter la ville de Lyon. Le commandement régional des Forces Françaises de l’Intérieur (FFI) avait donné des ordres en ce sens à toutes les forces de résistance armée, craignant qu’à cette occasion les allemands ne ratissent la ville, quartier par quartier, exécutant tout détenteur d’armes et raflant tous les jeunes en âge de travailler en Allemagne.Obéissant aux ordres, nous avons préalablement effectué des reconnaissances afin d’implanter un maquis. Les monts du Lyonnais, près de Saint-Pierre-la-Palud furent choisis. Le 6 juin 1944 à la nouvelle du débarquement de Normandie, nous nous sommes rendus, toutes affaires cessantes, à la gare de Saint-Jean conformément aux ordres. Dans l’après-midi, un petit train nous a conduits jusqu’à Grezieu la-Varenne, et, à la tombée de la nuit, sous une pluie battante, nous installions notre camp à quelques kilomètres du village.Nous étions une quarantaine de combattants commandés par » Petit Paul  » , Salomon Mossovic, responsable militaire, et  » Louis » Roger Landini, responsable aux effectifs. » Petit Paul  » retourna à Lyon reprendre le commandement du détachement  » Carmagnole  » remplacé au maquis par  » Roman  » Ignaz Krakus (évadé des griffes de la police). Ce dernier resta jusqu’à la Libération le commandant militaire de  » Gabriel Péri ).

Le maquis était mobile, changeant souvent de place. Les combattants vivaient dans des huttes de branchages au plus profond de la forêt, le plus loin possible des fermes, afin de ne pas être repérés et d’éviter de mettre en péril la vie des paysans et de leur famille. Car les nazis, la milice ou les GMR (Groupe Mobile de Réserve) n’épargnaient ni les fermes, ni les habitants lorsqu’ils attaquaient les maquisards.
L’activité militaire du maquis dans la région de Saint-Pierre-la-Palud fut très importante.
Les chefs décidèrent de renvoyer des groupes de combattants en ville pour continuer la guérilla urbaine et de laisser une partie des combattants dans le maquis pour le développer et accueillir la jeunesse, les habitants des alentours.
Le maquis était rattaché au détachement FTP-MOI « Campagnole ». Contrairement aux maquis traditionnels opérant dans les campagnes le rôle du FTP-MOI était de porter la guérilla urbaine dans les villes (Lyon et sa proche banlieue).
Les éléments du maquis ont participé à la bataille pour la libération de la région de Lyon et de Villeurbanne en attendant l’arrivée des forces alliées.On peut raisonnablement penser (différents témoignages) que des éléments Saint-Pierrois ont participé activement aux activités du FTP-MOI Campagnole avant juin 1944 en particulier sur l’approvisionnement en explosifs (présents sur le site minier) et éventuellement pour l’accueil de résistants trop impliqués dans la guérilla urbaine de Lyon. 

« Le maquis créé à St-Pierre-la-Palud permet donc d’obtenir des explosifs : beaucoup de mineurs d’origine polonaise participent ainsi à la résistance »

« Les membres des groupes de langue polonaise de la MOI étaient surtout d’anciens soldats des Brigades Internationales d’Espagne, de la Brigade Jaroslaw Dabrowski (environ 3000 Hommes). Les membres de cette compagnie, formés à St Pierre la Palud furent plus tard incorporés dans le « Bataillon Henri BARBUSSE » , »Cette compagnie prit une part active à la libération de St Consorce, de Villeurbanne et de Lyon »

Il convient de rappeler que le maquis composé au début d’une vingtaine de résistants s’était considérablement renforcé, par les jeunes des villages des monts du lyonnais, par les pompiers de Mornant, par des policiers, des GMR, des déserteurs allemands et il comptait environ 300 hommes et femmes fin août 1944.

4 – Principaux évènements concernant Saint Pierre la Palud en 1944 :

L’activité déployée par le maquis dans la région de Saint-Pierre La Palud fut très importante. Sabotage des voies ferrées, des mines de Saint Bel, Saint-Pierre La Palud, gare de Lausanne, défilé drapeaux en tête le 14 juillet à Saint-Pierre la Palud. De nombreux Saint-Pierrois participèrent au maquis en particulier Joseph et Georges GAY (père et fils) tués en combattant dans ses rangs.

  •  Le 14 juillet, défilé du maquis à St Pierre.
  •  Le 2 août, attaque par les GMR (Groupes Mobiles de Réserve : police de Vichy) et mort de Joseph GAY.
  •  Le 24 août , mort de Georges GAY, son fils, dans les combats de Villeurbanne.

 Ladislas MANDEL: « Les actions ont continué, le maquis s’est étoffé et, le 14 juillet 1944, on a décidé de célébrer la prise de la Bastille à Saint-Pierre-la-Palud qui était la localité la plus proche du maquis. Les copains sont arrivés en camions. Il y a eu une espèce de cérémonie. On a rassemblé la population à qui on a distribué des victuailles que l’on avait récupérées à la coopérative de la mine toute proche. Et tout d’un coup, j’ai reçu une balle, soi-disant perdue, dans la hanche. »

Pierre FERRA : « À Saint-Pierre-La Palud, le trust des industries chimiques Saint-Gobain exploitait des mines de pyrites qui travaillaient au profit des Allemands. En juillet 1944, nous devions empêcher que plusieurs tonnes de minerai ne soient utilisées au profit de l’armée allemande. Pour cette opération, des renseignements et des plans nous avaient été fournis par des mineurs. Un jour, nous avons appris que plusieurs tonnes de pyrite devaient quitter la mine. Pour empêcher son utilisation par les Allemands, nous avons préparé une attaque afin de neutraliser les gardes armés. Un premier groupe de résistants les a pris par surprise pour les désarmer alors qu’un second groupe a neutralisé le centre minier. Ne possédant pas les clés de la pièce où était la dynamite, il nous a fallu forcer plusieurs portes blindées à la barre à mine et à la masse pour l’atteindre et l’emporter. Pour empêcher le chargement de sortir, nous avons fait sauter monte-charge et matériel d’extraction. L’opération a duré toute la nuit avant que l’on ne rejoigne nos bases en déjouant les patrouilles allemandes alertées.« 

Pierre FERRA : « Un matin notre camp s’est trouvé encerclé par des forces importantes de miliciens, des groupes mobiles de réserve. Ce sont des partisans soviétiques qui ont donné l’alerte. Alors que nous pensions être parvenus à rompre l’encerclement, nous nous sommes à nouveau trouvés en face de forces armées, et c’est encore grâce à la vigilance d’un Soviétique qui a aperçu, derrière des buissons, les fusils-mitrailleurs pointés sur nous, qu’à la nuit, nous avons pu nous échapper dans la forêt laissant cependant des hommes sur le terrain. »


5 – Libération de Villeurbanne :

Le 24 août, des éléments de Carmagnole sont réunis en limite de Villeurbanne et Lyon. Ils ont l’intention d’attaquer le garage de la Croix-Rouge et de s’emparer des camions. Passe à vitesse réduite un train de troupes. Les Allemands, apercevant un groupe en armes et muni de brassards ouvrent le feu et alertent aussitôt d’autres unités. Du côté des M.O.I., un blessé, Jean-Edouard Ottavi. un Corse, mais surtout la menace de l’encerclement.

 A Villeurbanne, la nouvelle de l’échauffourée s’est répandue en quelques instants : « les gars du maquis sont là ! « . Aux fenêtres apparaissent des drapeaux. La Mairie, le commissariat sont occupés sans aucune résistance des centaines de volontaires arrivent, jeunes, vieux, avec de vieux fusils de chasse échappés à la réquisition. Les milices patriotiques occupent les usines, et Lefort (George Filip) envoie des agents de liaison vers son maquis de Saint-Pierre-la-Palud, d’autres vers le détachement  » Liberté  » afin qu’ils rejoignent Villeurbanne assiégée, ainsi que vers les Américains.

ROMAN, commandant du maquis avait reçu l’ordre de joindre Lyon par la Demi Lune et Vaise.
A la Demi-Lune des soldats allemands retranchés dans des édifices barrèrent la route par un feu de mitrailleuses durant un combat qui devait durer une demi-journée obligèrent les maquisards à se replier, laissant un gendarme-chef du détachement tué.
A Craponne devant la concentration de troupes de maquisards nous nous sommes repliés sur Sainte Consorce.
C’est dans cette localité que la troupe fut mitraillée par erreur par des avions alliés causant des pertes importantes : une vingtaine de tués et blessés. 
Après cet épisode tragique le maquis de la Croix Du Ban se dirigea sur Lyon par les quais de la Saône et le pont de l’Homme de la Roche.


6 – Les F.T.P – M.O.I. : les immigrés dans la résistance

Si aujourd’hui les combattants FTP-MOI sont auréolés d’un grand prestige, la 35e Brigade à Toulouse, Carmagnole à Lyon, Liberté à Grenoble, Marat à Marseille, Manouchian à Paris… leur combat a été plongé dans l’oubli pendant 40 ans. Ils ont pourtant été le fer de lance de la résistance armée.

La M.O.I. a été créé par le Parti Communiste après la première guerre mondiale. Elle regroupait les travailleurs étrangers qui affluaient en France où manquait sévèrement la main-d’œuvre. Ces travailleurs étaient organisés en «groupe de langues» qui se renforcèrent par l’arrivée des émigrés politiques des divers pays d’Europe où se développait le fascisme. En 1930 la France compte environ 3 million et Demi d’immigrés.
 La première immigration apportant en France a été celle des arméniens « particulièrement dans la région lyonnaise » qui fuyaient le génocide perpétré par les turcs. La seconde a été l’immigration économique espagnole. Puis, on a assisté à l’arrivée massive des polonais comme ouvrier agricole et mineurs. Ces mineurs polonais qui, plus tard à Saint-pierre La Palud, approvisionnerons en explosifs le détachement CARMAGNOLE. Dans les années 20 arrivèrent les juifs d’Europe centrale qui venait en France soit pour des raisons économiques ou politiques, soit pour fuir l’antisémitisme. Après l’arrivée de Mussolini au pouvoir des communistes et démocrates italiens quittèrent leur pays pour se réfugier en France. Entre les deux guerres, le nombre de jeunes juifs à (polonais, roumains, hongrois, le yougoslaves, ect) venaient faire leurs études supérieures en France pour échapper au « numerus clausus » existant dans leur pays. En 1933, Hitler au pouvoir, ce sont les communistes et les juifs allemands qui arrivent en France puis, quelques temps après, ceux d’Autriche et de Tchécoslovaquie. Enfin, se fit le tour des républicains espagnols.

La plupart de ces immigrés arrivaient en France sans papiers, sans connaître la langue, sans moyens d’existence. La M.O.I. apportait son aide aux nouveaux arrivants et organisait la majorité de ces immigrés dans la lutte antifasciste.

La défaite de 1940 ayant créé des conditions et des difficultés nouvelles, les éléments les plus conscients des groupes de langues M.O.I se réorganisèrent sous la direction de responsables aguerris dans leur pays d’origine et dans la majorité émanait des rangs du parti communiste. La M.O.I. entreprit sans tarder la lutte contre l’occupant. Ce fut d’abord une intensification des combats politiques : aide aux victimes de la répression, fabrication de faux papiers, tirage et diffusion de tracts et journaux. Puis, les immigrés participèrent activement à la création de l’O.S. (organisation spéciale du Parti Communiste) qui permit de passer à une action plus directe contre l’occupant et les collaborateurs. Les anciens combattants des brigades internationales en Espagne ont apporté leur expérience dans la lutte. Commencèrent alors les actions contre les lignes téléphoniques et électriques, puis contre les usines travaillant pour les allemands. Bref, la M.O.I. organise systématiquement le ralentissement et le sabotage de la production destinée à l’occupant. Enfin ce furent les attaques contre les officiers et soldats allemands, les miliciens et les collaborateurs. En Zone Nord, le détachement Manouchian fut l’un des plus actifs dès 1942.

Après le départ de Lyon des allemands, en 1940, la direction nationale a désigné un responsable de la M.O.I. pour la Zone Sud, afin d’éviter de trop de passage entre les deux zones. Et c’est en juin 1942, avant même l’occupation de la zone sud, que tous les groupes armés des diverses sections de la M.O.I. furent regroupés dans les F.T.P.-M.O.I. . Sous le commandement de l’état-major général F.T.P. F, Avec des commandements interrégionaux et régionaux comprenant à tous les échelons : un Commandant militaire, un Commandant politique (Commissaire aux effectifs) et un Commandant technique. Les mutations des cadres étaient fréquentes ; il s’avère impossible de les citer tous.

A Lyon, les F.T.P-M.O.I dépendent de la direction de l’ inter-région H-1-4.
C’est durant l’été 1942 que fut créé le détachement « Carmagnole» à Lyon, regroupant à ses débuts cinq à dix militants communistes ou membres des jeunesses juives.
Par la suite, les effectifs des groupes d’action augmenteront et, en juin 1944, fut mis en place dans les monts du lyonnais le maquis « Gabriel Péri» dit « maquis de la croix du Ban ».
 
Les activités des F.T.P-M.O.I furent variées et soutenues : sabotages ferroviaires {voies ferrées, dépôts SNCF, déraillements … }, attaques des troupes d’occupation {Fort de Montessuy, tramway ligne 24, cinéma Royal. .. }, sabotages industriels (usines Bronze-avia, Grammon, Berliet .. . ), exécution de collaborateurs {Président Faure-Pinguely}.
Jamais d’attentats aveugles, leurs actions sont toujours très ciblées.
Pourtant les combattants FTP-MOI restent très peu nombreux : fin 43 Carmagnole compte 50 membres, Liberté en compte 40, tandis que la 35e Brigade à Toulouse en compte environ 60.
Les mutations de combattants entre groupes urbains et maquis, et entre les détachements « Carmagnole » {Lyon} et « Liberté » {Grenoble} étaient fréquentes.
Du 24 au 26 août 1944, les F.T.P-M.O .I prirent part et encadrèrent l’ insurrection de Villeurbanne. Fin août et début septembre, ils participèrent aux combats de la libération de Lyon .


7 – Composition des FTP-MOI :

L’organisation des groupes M.O.I est « triangulaire » à tous les niveaux. Les combattants étaient organisés en équipes (3 hommes), groupe (3 équipes), détachement (3 groupes), compagnies et bataillons.
Ces deux dernières unités n’existèrent que plus tard, au moment où de nombreux éléments vinrent grossir nos rangs : rescapés des rafles, jeunes qui désiraient se battre pour lutter contre la férocité grandissante des allemands 1942 et la première moitié de 1943 furent terriblement difficiles : Les groupes manquaient d’armes, de munitions, d’argent, de cartes d’alimentation, de cartes d’identité, de logements clandestins. La lutte n’en fut pas moins fort active.
 
La cellule de base est constituée de trois combattants, chacun étant responsable d’un domaine : militaire, politique ou technique.
 Les règles de sécurité sont draconiennes et le cloisonnement impératif {exemples : aucun contact ne doit s’opérer entre membres d’un groupe « urbain » en dehors des actions – seul le responsable « technique » dispose des armes et explosifs qu’il distribue avant chaque mission puis les récupère à l’issue}.

 Le chef « militaire » est responsable des actions de guérilla urbaine. Principale autorité, il est aidé par le « politique » qui veille particulièrement à la cohésion du groupe et à son moral. Le « technique » a la garde et l’entretien des armes qu’il distribue à chaque combattant sur les lieux de l’action et qu’il rapporte après coup ; lui incombe aussi tous les problèmes d’intendance : les salaires, les loyers… Les unités de guérilla disposent de services techniques qui les aident à tous les stades du combat : dépôts d’armes et de matériel, services de renseignements, de santé. Les liaisons sont assurées par des jeunes filles qui ne sont pas seulement cantonnées dans cette activité : nombre d »entre elles participent au combat ou récupèrent armes et explosifs.

« La stratégie militaire des FTP-MOI s’appellait  » la boule de mercure « . Un exemple d’organisation des combattants lors d’une attaque: 1 groupe = 9 hommes1 équipe = 3 hommes1 détachement = 3 groupes = 27 hommes (effectif d’une mission de grande ampleur).
Beaucoup de Volontaires étaient de tout jeunes gens, Juifs originaires de Pologne et d’Europe centrale, pour certains nés en France, à peine sortis de l’adolescence, rescapés des rafles de juillet42, ayant perdu les leurs ; d’autres venaient de l’émigration locale ou encore étaient des étudiants polonais, hongrois, roumains, tous juifs, que le numerus clausus appliqué dans leur pays, avait contraint, avant guerre. à entreprendre leurs études en France. Cette jeunesse se regroupait autour des anciens des Brigades internationales, volontaires de la guerre d’Espagne, évadés des camps d’internement français, des antifascistes (de l’Europe entière : Espagnols, Italiens, Polonais, Yougoslaves, Allemands, Français…) qui avaient acquis dans le combat l’expérience nécessaire pour mener cette guerre impitoyable. Le fait que beaucoup d’entre eux soient d’origine juive n’est pas déterminant. C’est bien la lutte pour la liberté qui motive ces étrangers qui se sont battus pour la France.

8 – Opérations réalisées dans la région Rhône-Alpes F.T.P.-M.O.I. CARMAGNOLE et LIBERTE 

  • – Morts au combat officiellement dénombrés : 94
  • – Survivants : 144 (Parmi lesquels 48 combattants immatriculés après le 6 juin 1944)
  • – Nombre total d’opération militaires homologuées par les services de l’armée :Carmagnole Lyon : 261 Liberté Grenoble : 178 TOTAL : 439 auxquels s’ajoutent tous les combats de la libération (avec probablement plus de 200 autres opérations non homologuées).
  • – Attaques contre les usines, officiellement homologuées :Carmagnole Lyon : 46 Liberté Grenoble : 53 TOTAL : 99
  • – Attaques directes contre les troupes d’occupation officiellement homologuées (plusieurs centaines de morts ou de blessés) :Carmagnole Lyon : 51 Liberté Grenoble : 16 TOTAL : 67
  • – Déraillements et sabotages de dépôts ferroviaires, officiellement homologués (plusieurs centaines de locomotives et wagons détruits) :Carmagnole Lyon : 52 Liberté Grenoble : 39 TOTAL : 91
  • – Attaques contre les garages allemands, officiellement homologuées (plusieurs centaines de véhicules détruits) : Carmagnole Lyon : 14 Liberté Grenoble : 12 TOTAL : 26

Biographies

Norbert Kugler (« Albert »), né en 1906 en Haute Bavière, dans une famille juive, il fuit l’Allemagne après l’arrivée de Hitler au pouvoir et rejoint son frère à Toulouse. Il s’engage dans les Brigades internationales et combat en Espagne dans le bataillon Thaelmann où il sera promu lieutenant. Il rejoint Toulouse fin 1938 et est arrêté comme « citoyen d’un pays ennemi » en 1939. Libéré avant l’arrivée des Allemands, il regagne Toulouse et reprend le travail illégal. Envoyé à Lyon en 1942, il est un des créateurs de ce qui va devenir l’unité lyonnaise des FTP-MOI « Carmagnole ». Il sera successivement responsable du détachement, puis interrégional et enfin responsable des FTP-MOI pour l’ensemble de la zone sud, responsabilité qu’il assume jusqu’à la Libération.

Georges Grünfeld (« commandant Lefort « ), Hungaro-Roumain de Transylvanie, est né en 1919 dans une famille juive. Il vient en France, à Grenoble, pour y poursuivre des études. Il adhère d’abord à « Combat » avant de rejoindre les FTP-MOI du détachement grenoblois « Liberté » dont il devient le chef. Il est muté en mars 1944 à Saint-Étienne comme responsable régional des départements de la Loire et de la Haute-Loire. En mai, il devient responsable de l’interrégion Rhône-Alpes HI4 (Lyon/Grenoble) et commandera l’insurrection de Villeurbanna des 24, 25 et 26 août 1944. À son retour en Roumanie après la guerre, il prend le nom de Georges Filip.

Ignaz Krakus ( » Roman » ), Juif polonais né en 1909, quitte son pays fin 1936 pour s’engager dans les Brigades internationales en Espagne. Interné dans différents camps à son retour en France, il s’évade du Vernet en 1941 et gagne Lyon où il sera un des premiers combattants du détachement FTP-MOI « Carmagnole » dont il deviendra le chef. Chargé en mai 1944 de créer le maquis « Gabriel Péri » de la Croix-du-Ban, il en assume la responsabilité jusqu’à la Libération. Il rentre en Pologne après la fin de la guerre, mais reviendra en France en 1969.

Dina Krischer, repliée et cachée à Lyon, sans avoir jamais fait partie d’un mouvement organisé, elle rejoignit par hasard le groupe Carmagnole de la FTP-MOI, où elle participa avec Simone Motta et Jacqueline Szynkmann aux mêmes sabotages, attentats et combats que les hommes. Elle dut même, alors qu’elle s’était réfugiée dans une cour près du Parc de la Tête d’Or lors d’une action en août 1944, abattre deux Allemands qui l’avaient découverte et allaient l’arrêter : « J’ai arraché leurs grades pour les donner à mon chef de groupe car quand on faisait une action seule, il fallait une preuve tangible ».

Cécile MANDEL (« Colette ») médecin dévoué et courageux de « Carmagnole », «Simon Fryd» et« Gabriel Péri); elle a soigné nombre de camarades blessés ou malades.

LERNER – JACQUINOT (« Hélène »)  plus âgée la plupart des maquisards les a entouré d’une affection maternelle ces adolescents venant de la ville et perdu dans ces forêts.

Sources :
 - compilation de nombreux articles sur Internet
- Revue MIGRANCE - Chantal Jorro, responsable du centre de documentation - Centre d'Histoire de la Résistance et de la Déportation
 - revue-guerres-mondiales-et-conflitscontemporains-2009 (Ladislas MANDEL dans les rangs des FTP-MOI - Claude Collin)
 - anacr-rhone.fr
 - Stéphane COURTOIS, Denis PESCHANSKI, Adam RAYSKI, Le Sang de l’étranger – Les Immigrés de la M.O.I. dans la Résistance, Fayard, 1989
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